mardi 8 juillet 2014

la digitalisation pour les nuls

c’est quoi un projet de digitalisation ?
ça parait bête tellement tout le monde en parle…et pourtant, en quoi ça consiste ?
voici ma version : en général, cela se traduit par 3 grands sujets : la digitalisation des salariés, celles des process…et celle des clients !
la digitalisation des salariés : en gros, leur faire découvrir les réseaux sociaux genre FB, twitter, Linkedin : leur faire se créer un compte et puis les faire s’abonner aux comptes de l’entreprise (ça donne toujours des followers…).  cette étape ne pose pas trop de problèmes, sauf peut-être à se demander :  « est-ce que j’ai le droit de twitter ça ? de suivre la concurrence ? qui va lire mes tweets ? mes posts ? le droit à l’oubli ? comment j’efface ? est-ce que je parle en mon nom à moi ou au nom de l’entreprise ? »....il faut faire des exercices pratiques : et là ça devient : «  j’ai de trop gros doigts de toutes façons, où sont mes lunettes ? ben pourquoi t’as pas mis ton vrai nom ? t’appuie où fais voir ?mais t’as quel âge ? c’est dingue le saut de génération ?! »  bref, il faut quand même avoir bien préparé son coup…pour cela, vous pouvez préparer des petits fascicules : facebook pour les quinquas, twitter expliqué aux bolos etc….à cacher quand vous rentrez chez vous si vous ne voulez pas provoquer l’hilarité de vos ados. D’ailleurs, certaines entreprises en profitent pour faire du reverse mentoring : ce sont les jeunes apprentis ou stagiaires qui débarquent en codir ou comex et font les démos et coaching en one-to-one…d’où une grande différence entre le ton des premiers tweets (faits avec les coaches)…et les suivants fait tout seul et où on s’emmêle les pinceaux entre les @ .@ et autres #... le pire qui puisse arriver : votre patron découvre en séance que son compte existe déjà…mais qu’il n’est pas au courant : qq tweet en son nom depuis déjà un an…
une autre étape : certaines vont jusqu’à avoir un réseau social d’entreprise « privé » : et il faut alors montrer comment les salariés peuvent se l’approprier et s’en servir. les questions peuvent alors être : est-ce que les groupes sont sur des sujets pro ? ou perso ? et si mon chef voit que je me suis inscrite dans le groupe « cuisine vietnamienne » ou « amateurs de foot brésilien (c’est plus de saison ;-) » : qu’est-ce qu’il va me dire ? et je préférai qu’il ne soit pas au courant ? ai-je le droit d’aller sur ce réseau social pendant mes heures de travail ?et ça marche sur la tablette ? sur le mobile ? bon , ça sert à quoi en fait ?
l’étape ultime sera de fournir smartphone ou tablette avec les applis métiers à tous vos salariés : ce sera trop la classe !…mais on reviendra sur ce point.

les process : la seconde digitalisation est celles des années 90, avant internet, quand on parlait d’EDI pour parler en direct avec les fournisseurs : ben oui, ça revient à la mode : et pour tous els process de l’entreprise : au lieu de s’envoyer tonnes de cartons de paperasse : on essaie de s’envoyer tonnes de mails et de fichiers : c’est la dématérialisation, la dépapérisation…ou, comme le disent certains : le dédoublonnement : car comme les applications métiers n’ont pas vraiment prévu le truc dès le départ : au lieu de faxer ton doc : tu le prend sur l’appli, tu l’imprimes, tu le remplis à la main, puis le scannes puis l’envoies par mail et ranges le papier dans le placard.. ; en y ajoutant la copie du mail et de l’accusé de réception pour être sûr d’avoir la preuve.  Vous  l’aurez compris, cette étape n’est pas la plus efficace ni la plus sexy…mais est souvent la seule qui soit mise en œuvre ! 
le fait de ne pas faire en double, d’avoir des vraies applications digitales from scratch est super couteux…et souvent très complexe ! de l’avis de tous les utilisateurs que je connais, ils peuvent comparer leurs SI (système d’information) à un plat de spaghettis : et donc démêler les spaghettis sans s’en mettre partout sur la figure : ça semble impossible. Idem avec le SI : rajouter un champ dans un écran prend 18 mois, voire 2 ans, et en plus ça coute trop cher pour une veille application! un collègue me disait : le 2.0 c’est 2 ans de délai et 0 budget ;-))
Bon, donc , à moins que vous ne soyez dans une entreprise où il faut absolument recycler les bénéfices dans le changement des process internes pour être au top du top et avoir des salariés fiers de leur système d’information…cette étape de digitalisation des process se réduit à ajouter un mail au process existant.
Non, j’exagère : on peut aller jusqu’à la signature électronique des documents : mais là, il faut investir tout de même pas mal : pour certifier que c’est bien vous avec votre clé cryptée qui a signé depuis votre PC plutôt que de votre bic...ça coûte un bras. En revanche, le gain de temps (car beaucoup de dossier sont simplement bloqués « à la signature ») est simple et immédiat.
Si vous tenez à votre bras : vous pouvez tricher avec votre smartphone ou tablette et signer à la main, prendre la photo du doc…vous envoyer la photo sur votre mail, stocker la photo qq part ensuite et la joindre en mail : mais on revient sur la solution précédente, on est d’accord ? : vous avez passé 3 fois plus de temps mais on peut dire que vous avez gravi une marche vers la digitalisation….

troisième étape : nos clients ne nous ont pas attendus : ils vous sonnent à toute heure, vous envoient des mails à tout bout de champ, s’insurgent si vous ne répondez pas…et même vous tweet ou vous apostrophent sur Facebook.
Diantre, qu’avez-vous prévu ? votre petit dernier en stage de troisième en tant que web community manager ? ça risque de ne pas suffire : il faut vous faire une stratégie : vous voulez répondre ou non à ces sollicitations ? vous aviez prévu de tchatcher / chattter  avec vos clients, mais personne ne vous invite. vous aviez prévu de faire des appels visio avec vos clients, mais là , ce sont les salariés qui n’ont pas envie de se montrer… bon, cette étape est la plus cruciale car il faut être rapide  et prendre des décisions…que l’on peut changer rapidement ! et c’est là qu’on prend un grand coup au moral car on se rend compte que le monde va plus vite…que nous. Bon, reprenons-nous : pour les clients qui vous apostrophent, une best practice est de les laisser se débrouiller tout seuls…environ jusqu’à 30 min : en général avant 30 minutes un autre utilisateur ( et donc pas vous) aura répondu à la question (et avec une réponse souvent bien meilleure que la votre…) sur un forum. Le sens du partage, du share, du je t’aide et c’est gratuit a en effet envahi la sphère et pas besoin de savoir si aller regarder sur FB fait partie de mon job et si on a traité ce point en CHSCT et si le code du travail prévoit que je peux lire mes mails dans le métro….non, c’est trop tard : on a déjà répondu avant vous. Une autre best practice est de donner accès à tous vos salariés qui sont en contact clients à l’ensemble des infos concernant le client : ça parait bête tellement c’est évident, mais imaginez l’effet whaouh : « bonjour monsieur le client, oui, je vois que vous nous avez appelé hier et aussi tweeté ce matin, est-ce que la réponse que Ilovethatboite vous a envoyée vous a convenu ? oui ? cela correspondait aux photos que notre technicien avaient prises de vos locaux, etc…. »
attention, là, on aborde deux grands thèmes que la digitalisation pousse au grand jour : le contrôle et le share. SI vous voulez contrôler tout, savoir tout ce qui s’est passé, tout ce qui a été dit sur votre entreprise, par qui,  etc…c’est perdu d’avance. C’est impossible. Si vous pensez qu’il y a trop d’infos et que c’est de l’infobésité, idem, c’est perdu : il faut laisser les choses passer : on ne peut pas être au courant de tout, avoir lu tous les mails, tous les posts, tous les tweets. Marie Khayat (prof à l’ESSEC) dit de manière très poétique : laisser ça couler les tweets comme une rivière, ce n’est pas grave si vous ne voyez pas tout….laisser couler, pas de stress.
Et partager, partager au maximum les infos, vos analyses, vos documents : soyez transparent au maximum : ça va de pair : vous ne pouvez pas tout contrôler, donc il faut partager les infos que vous avez pour voir avec les collègues et reconstruire une image plus globale.  Et bien sûr, le fait d’être transparent vous aidera aussi …à faire des choses bien ! 

Les trois étapes de digitalisation : les salariés, les process et les clients, ne sont donc que la partie émergée de l’iceberg….la vraie transformation se fait ailleurs, dans les changements de mentalités : mentalités qui sont obligées de changer puisque l’info est dispo partout, ailleurs, plus rapidement, pas contrôlée par le chef…quid du manager ? que va-t-il dire en réunion d’équipe ? les scoops sont déjà connus de ses collaborateurs avant lui. quid de la reconnaissance du salarié qui passe son temps à donner des infos à ses collègues sur les réseaux sociaux ? quid de la réunion du lundi matin 9h avec son chef chef si on peut se connecter en visio de n’importe où ? quid des clients qui vont demander aussi une transparence totale sur les délais, les prix, les conditions de fabrication, et aussi bien-sûr avoir des idées pour vos produits ?
La digitalisation fait que tout est transformé en information, et que cette information peut circuler rapidement, très rapidement : tellement rapidement qu’elle devient dispo partout tout le temps et pour tous. Tout ce qui était basé sur « j’ai l’info, je la garde, je la distribue quand bon me semble » où la valeur ajoutée était réduite à mettre des infos ensemble, devient tellement accessible qu’inutile et ridicule…euh,  et c’était quoi votre métier déjà ?


PS : Et le big data dans tout ça ?
- je vous raconterai la prochaine fois.

1 commentaire:

  1. ah que voila une sacrée transformation dans la relation humaine ! Il est vrai que celui qui maîtrise ( "super bien" of course! ) les nouvelles technologies aura une longueur d'avance sur ses concurrents. Certes les échanges sont rapides mais l'être humain se retrouve derrière un écran pour discuter avec son semblable, quid de la relation directe ? où tous les sens peuvent être sollicités: la vue, l'interlocuteur se dévoile de la tête aux pieds, l'environnement de la rencontre, la lumière, crue ou voilée, l'ouïe, la parole de l'autre, son rire, ses murmures, le bruit de fond, de la rue ou du bureau, de l'endroit où nous sommes ensemble, l'odorat, et oui, pourquoi pas le parfum de l'autre, les odeurs dégagées par exemple devant un bon plat lors d'un dîner, d'affaire bien entendu! le toucher, allez, va pour la tape sur l'épaule et la bonne poignée de main lorsque l'échange satisfait les parties engagées.
    Bref, différence de génération ??? peut-être .
    Certes il faut être "rapide" pour être le "premier", mais, comme disait (déjà) ma grand-mère : c'est trop bête d'aller plus vite que la musique.
    Sachons raison garder et conserver les côtés positifs de la vie de chacun.
    un vieux

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